Sunday, August 17, 2014

Roma illustrata

[First posted in AWOL 17 August 2014, updated 10 April 2015]

Roma illustrata. Représentations de la ville
Responsables : Philippe Fleury et Olivier Desbordes
2008, 16 x 24, br., 458 p., ill.
ISBN : 978-2-84133-310-3
Cet ouvrage rassemble les vingt-quatre communications prononcées lors du colloque Roma illustrata organisé à l’université de Caen Basse-Normandie en 2005 autour du Plan de Rome de Paul Bigot et de son double virtuel. Cette rencontre s’est ouverte de façon très large à la question de la représentation de la ville et de ses symboles. Il s’agissait de mettre à contribution, dans une confrontation sans a priori disciplinaire ou méthodologique, différentes approches possibles : littéraires, iconographiques et archéologiques.

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Responsables : Philippe Fleury et Olivier Desbordes
Notice de l’ouvrage
Philippe Fleury : Avant-propos
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Jean-Pierre Adam : La première ville nouvelle de l’Histoire : une capitale pour l’Éternité
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Vers 2700 avant J.-C., le roi Djeser, souverain d’une Égypte unifiée, fait élever sur le plateau désertique dominant à l’ouest sa capitale Memphis, un simulacre de cette ville, sur lequel il va régner pour l’Éternité. Imhotep, architecte du roi, imagine, pour la première fois de l’Histoire, de bâtir cette cité éternelle, non plus en briques crues, matériau humble et périssable, mais en pierres finement taillées et assemblées, et au centre de laquelle va se dresser le tombeau royal, qu’il voudra signal perceptible sur l’horizon par toutes les générations. Le défi étonnant lancé par Djeser fut un aboutissement et un triomphe sur le temps, puisque aujourd’hui, après 4700 ans, la Memphis d’Éternité demeure le complexe funéraire le plus vaste et le plus monumental, au sens étymologique du terme, qu’un roi ait jamais élevé. Or, cette réalisation hors du commun constitue à la fois le premier ensemble architectural de pierre, géométriquement conçu et discipliné de l’humanité, mais aussi la première « ville nouvelle » qui fut jamais imaginée. Une ville dont le paradoxe inouï est qu’elle ne fut conçue que pour des morts.
The first new town in History : a capital for Eternity
Around 2700 BC, King Zoser, ruler of a Unified Egypt, laid out in the desert plateau to the west of his capital Memphis, a dummy copy of his city, where he would reign for Eternity. The King’s architect, Imphotep, conceived for the first time in history a city built not in the traditional, humble, crumbly baked brick, but in exquisitely dressed and fitted stone. At its heart a great royal tomb was going to be built, an unmistakeable feature on the horizon, bearing witness for all generations to come. The striking challenge thrown down by Zoser was to claim a victory that overcame time itself, so that now, some 4700 years later, the Eternal City of Memphis remains the most monumental and most extensive funeral complex ever achieved by any monarch. Yet this extraordinary achievement would constitute both Man’s first architectural complex built in
stone and laid out along strict geometric lines and the first “new town” ever conceived : an incredible paradox, given that it was designed for the exclusive use of the dead.


Jean-Luc Bastien : Les temples votifs de la Rome républicaine : monumentalisation et célébration
des cérémonies du triomphe

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Pendant les trois derniers siècles de la République, la construction de temples votifs a été un des modes privilégiés de commémoration des triomphateurs. Il semble d’ailleurs exister un lien entre l’aptitude à triompher et celle à assurer le processus de construction d’un temple
votif. Un général n’ayant pu accéder au triomphe se voit pratiquement privé de la possibilité d’assurer son processus votif. La construction d’un temple constitue un des principaux supports de mémoire pour les triomphateurs. Cette problématique est abordée ici à partir de l’étude du calendrier et notamment des corrélations existantes entre les dies natalis des temples et les dates des cérémonies triomphales.

The votive temples of republican Rome : the monumental character and celebration of the triumph
During the three centuries of the Republic, the construction of votive temples had been one of the favoured ways of commemorating the achievements of victorious generals. There seems indeed to be a link between the ability to triumph over enemies and the ability to ensure that a votive temple would be built. If a general were to prove unable to attain a triumph, he would find himself
virtually deprived of any possibility of instigating the votive process. For those generals granted a triumph, known as Triumphators, the building of a temple constituted one of the main means of underpinning the memory of their victories. This problematic is examined here through a study of the calendar and in particular the existing correlations between the dies natalis of temples, and the dates of triumphal ceremonies.


Stéphane Benoist : Les processions dans la cité : de la mise en scène de l’espace urbain
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L’identité politique et religieuse de Rome s’affirme par l’expression ordonnée et en mouvement d’une société parcourant un espace défini partagé entre hommes et dieux. Témoignages littéraires, épigraphiques, numismatiques et iconographiques illustrent cette représentation consciente d’une ciuitas, en tant qu’espace et communauté.

Processions within the city : from staging to the urban space

The political and religious identity of Rome asserted itself through the ordered expression of a society moving across a defined space shared between men and gods. Letters, literature, coins and iconography testify to this conscious representation of a ciuitas, as urban space and as community.


Dominique Briquel : Rome comme ville étrusque
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Même si les récentes découvertes d’A. Carandini sur le Palatin montrent que la Rome du VIIIe siècle apparaissait déjà comme une véritable ville, beaucoup d’historiens soutiennent toujours l’idée que Rome est, en tant que ville, une création de l’époque des rois étrusques,
et que cette influence étrusque a fait passer l’Vrbs du stade d’un conglomérat de villages à celui d’une cité. Cette conception de Rome trouverait un appui dans la littérature antique, puisque Denys d’Halicarnasse se réfère à des historiens grecs pour lesquels Rome était une
polis Tyrrhènis. Mais un examen de la tradition littéraire conduit à relativiser cette perception. Chez Denys, cette définition de l’Vrbs est tributaire d’une représentation archaïque de l’Italie en deux parties : au sud, la partie touchée par la colonisation grecque ; au nord, celle
restée indépendante, qui avait reçu la dénomination de « Tyrrhénie » d’après le nom du peuple indigène le plus important. Les auteurs latins n’ont pas davantage mis en relief le caractère étrusque de Rome. Certes la tradition souligne à l’envi certains apports étrusques ; mais il s’agit de points particuliers, qui n’impliquent pas la présence d’éléments de population toscans dans l’Vrbs. Ils ont parfois donné lieu à une entreprise de « désétrusquisation », visant à minimiser la dette des Romains envers leurs voisins du nord ; ils sont à ce titre un des points du débat important qui s’est fait jour sur ce thème à la fin de la République et à la période augustéenne. Mais si l’apport des Étrusques est admis sur certains points, le Romain ne reconnaît guère sa dette envers le monde étrusque : la tradition ne fait état que d’apports humains réduits, liés à certains groupes socioprofessionnels. Les influences artistiques ou linguistiques sont très peu soulignées ; l’idée d’une introduction de l’écriture par les Étrusques est occultée. Ce qui transparaît dans les textes, c’est principalement l’idée d’apports humains, linguistiques, culturels à partir du monde grec – au point que certains apports étrusques sont rapportés à la Grèce. La tradition littéraire latine est tributaire d’une vision qui ne pose le monde romain que par rapport au modèle grec : elle se ressent d’une
situation où l’importance ancienne de l’Étrurie ne venait plus à la conscience des Romains.


Rome as an Etruscan city

Even if the recent discoveries of A. Carandini on the Palatine show that VIIIth century Rome was already looking like a true city, many historians cling to the idea that Rome, as a city, is a creation of the period of the Etruscan kings, and that this Etruscan influence carried the Vrbs from a collection of villages to that of a true city. This idea of Rome is backed by Classical literature,
since Denys of Halicarnassus refers to Greek historians for whom Rome was a Tyrrhenian polis. But closer examination of this literary tradition leads us to set this perception in context. For Denys, this definition of the Vrbs follows on from the archaic representation of Italy divided into
two parts : in the south the area colonised by the Greeks, in the north, the area remaining independent, assuming the name “Tyrrhenia” after the name of the dominant native people. Latin authors did nothing more to highlight the Etruscan character of Rome. It is true that this tradition
falls over itself to underline certain Etruscan characteristics ; but it is always limited to certain
particular points which taken together do not add up to the presence of a Tuscan population as such within the Vrbs. It has even given rise on occasion to a campaign of “De-Etruscanisation” whereby the debt of the Romans towards their northern neighbours is played down. They are for this reason one of the major points of issue which surfaced at the end of the Republic and the Augustan period. But if the influence of the Etruscans is admitted in certain areas, the Roman himself would hardly ever acknowledge his debt towards the Etruscan world : literary sources only mention a trickle of human contact limited to certain socio-professional groups. Artistic and linguistic influences are barely mentioned ; the idea of the Etruscans introducing writing is set aside. The main thing to emerge in the texts is contact with the Greek world through linguistic,
cultural and human congress. The Latin literary tradition is an offshoot of a vision which only sets the Roman world in relation to the Greek model : it arises from a situation whereby the ancient importance of Etruria no longer registered with the Roman mind.


Jacqueline Champeaux : Images célestes de Rome : la Ville et ses incarnations divines
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La puissance temporelle de Rome s’est incarnée successivement en plusieurs figures divines
qui, plus que les protectrices célestes de la Ville, sont ses incarnations surnaturelles. Celle que nous appelons la Dea Roma est en fait d’origine grecque (apparue au IIIe siècle), et sa figure symbolique ne s’est imposée que lentement dans le monnayage et l’idéologie de la
République. Au temps d’Auguste, une nouvelle entité, une Fortuna Vrbis, qu’il conviendra de définir plus précisément, n’est pas parvenue à s’imposer de façon durable. C’est dans ses associations impériales, d’abord, sous Auguste, à la divinité du Prince, puis, sous Hadrien, à Vénus, mère de la nation romaine, que Roma, désormais titulaire d’un temple, accédera pleinement au statut divin. À travers ces alliances successives s’affirme l’image idéale que Rome
Éternelle entend donner d’elle-même à ses citoyens et au monde.

The staging of the Augustinian re-foundation of Rome in the “Room of the Masks” in the house of Augustus in the Palatine
The “Room of the Masks” is part of the private quarters of the Palatine residence of Augustus. Its decoration, which dates from between 36 and 28 BC, is centred on the landscape of the betyle or elevated stone altarpiece. In this landscape the association of the Apollonian “betyle” with the Romulean javelin and the Augustinian Roma quadrata, as identified by A. Carandini, symbolises
the re-foundation of Rome by Augustus under the auspices of Apollo. Through its allusion to the foundation of Rome by Romulus, this new foundation of Rome is presented as a return to the tradition, highlighted by the dialogue brought into play between the landscape of the betyle and
the other landscapes in the room, evocating rustic sanctuaries. However if the decoration makes a new Romulus of Octavius Augustus, the relations one can make out between all the different
parts of the fresco, the pinakes, down to the smallest detail, present Augustus as the political legatee
of Caesar, through the coming of this new Alexander. The inscription of “betyle” landscape
in the transposition painted on the frons scaenae reveals the stage setting, in the true sense of the
term, of the assumption of power by Augustus and the construction of a new Rome.


Laurence Chevillat : La mise en scène de la refondation augustéenne de Rome dans la « Salle des Masques » de la maison d’Auguste au Palatin
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La « Salle des Masques » fait partie des quartiers privés de la demeure palatine d’Auguste.
Son décor, qui date des années 36-28 avant J.-C., est centré sur le « paysage au bétyle ». Sur ce
paysage, l’association du bétyle apollinien avec le javelot romuléen et la Roma quadrata
augustéenne, identifiée par A. Carandini, symbolise la refondation augustéenne de Rome
sous les auspices d’Apollon. Par son allusion à la fondation de Rome par Romulus, cette
nouvelle fondation de Rome est présentée comme un retour à la tradition, souligné par le
dialogue instauré entre le paysage au bétyle et les autres paysages de la pièce, évocation de
sanctuaires rustiques. Cependant, si ce décor fait d’Octave-Auguste un nouveau Romulus,
les relations qu’il est possible de déceler entre toutes les parties de la fresque, des pinakes
jusqu’au moindre détail, présentent Auguste comme l’héritier politique de César, à travers
l’avènement d’un nouvel Alexandre. L’inscription du « paysage au bétyle » dans la transposition
peinte d’une frons scaenae dévoilerait la mise en scène, au sens propre, de la prise du
pouvoir par Auguste et la construction d’une nouvelle Rome.

The staging of the Augustinian re-foundation of Rome in the “Room of the Masks” in the house of Augustus in the Palatine
The “Room of the Masks” is part of the private quarters of the Palatine residence of Augustus. Its
decoration, which dates from between 36 and 28 BC, is centred on the landscape of the betyle or
elevated stone altarpiece. In this landscape the association of the Apollonian “betyle” with the
Romulean javelin and the Augustinian Roma quadrata, as identified by A. Carandini, symbolises
the re-foundation of Rome by Augustus under the auspices of Apollo. Through its allusion to the foundation of Rome by Romulus, this new foundation of Rome is presented as a return to the
tradition, highlighted by the dialogue brought into play between the landscape of the betyle and
the other landscapes in the room, evocating rustic sanctuaries. However if the decoration makes
a new Romulus of Octavius Augustus, the relations one can make out between all the different
parts of the fresco, the pinakes, down to the smallest detail, present Augustus as the political legatee
of Caesar, through the coming of this new Alexander. The inscription of “betyle” landscape
in the transposition painted on the frons scaenae reveals the stage setting, in the true sense of the
term, of the assumption of power by Augustus and the construction of a new Rome.


Élizabeth Deniaux : Les tempêtes et la vie politique : recherches sur l’imaginaire des Romains
de la fin de la République

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La mer a toujours suscité chez les Romains des sentiments de crainte, transmis par les textes
littéraires qui utilisent de multiples comparaisons maritimes. Les métaphores qui assimilent
les troubles de la vie politique aux tempêtes permettent de cerner les contours de cette peur
à la fin de la République. L’homme politique doit apprendre à les subir et à les affronter. À
l’époque des guerres civiles, nos sources mettent l’accent sur la Fortune des grands hommes
qui savent affronter aussi bien les dangers de la mer que ceux de la politique. L’histoire de
César et de sa Fortuna en est l’exemple le plus extraordinaire.

Storms and politics : research on the imagination of the Romans at the end of the Republic
Through literary sources the sea always evoked fear among the Romans, and maritime comparisons
were very common. Metaphors which likened life’s vicissitudes to a storm at sea help us to
mark out the nature of that fear towards the end of the Republic. The politician had to learn to
quell and confront them. At the time of the civil wars, our sources highlight the role of the Fortune
of great men who knew just as well how to confront the terror of the high seas and those of
politics. The history of Caesar and his Fortuna is the most extraordinary example of this.


Christine Dumas-Reungoat : La dimension symbolique de Babylone et du lien qui unit le roi à sa ville d’après l’Enuma eliš, Marduk, Créateur du monde et le Poème d’Erra
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Dans les mythes cosmogoniques de Mésopotamie, les villes occupent une place de tout premier
ordre, faisant partie des toutes premières choses créées. C’est le cas, entre autres, de
Babylone. Les dieux y élisent domicile, et ainsi s’élabore dans les textes mythologiques l’image
d’une « ville sainte », que les auteurs grecs, admiratifs de la ville historique, n’ont pas vraiment
saisie. Babylone, dans ces textes, est le centre de l’univers parce que Marduk, son roi, est également
le roi des dieux et de l’univers. Or, comme le raconte le Poème d’Erra, quand le dieu
de la guerre, Erra, dans sa folie belliqueuse, cherche à détruire l’univers, il lui faut chasser
Marduk de Babylone, car c’est la présence du dieu dans sa statue, abritée dans son temple,
qui préserve la bonne marche du monde. L’auteur du texte, en transposant fort probablement
plusieurs données historiques au plan mythique pour montrer comment Erra – se substituant
au roi – parvient à détruire, en particulier, les habitants de Babylone et la ville elle-même,
met en évidence les deux dimensions de la ville, « ville sainte » et ville historique, ainsi que le
lien consubstantiel qui unit le roi à sa ville – et symboliquement – le dieu à l’univers.


The symbolic dimension of the link that connected the king to his city,according to the Enuma elis, Marduk, Creator of the World ant the Poem of Erra

In the cosmogonic myths of Mesopotamia the town was of key importance, being among he very
first created things. This was the case, among others, of Babylon. The gods took up residence and
thus the mythological texts elaborate the image of a “Holy City” that Greek authors, admirers of
the historic town, did not fully grasp. Babylon, according to these texts, was the centre of the universe
because Marduk, its king, was also king of the gods and of the universe. However, as the
Poem of Erra relates, when the god of war, Erra, in his warmongering folly, sought to destroy the
universe, he had to drive Marduk of Babylon out, for it was the presence of the god in his statue,
housed in its temple, which maintained order in the world. The author of the text, in transposing
what were probably several historical elements into the realm of myth, shows how Erra, setting
himself up in the king’s place, managed in particular to destroy the inhabitants of Babylon and
the city itself. The author highlights the two dimensions of the town, the “Holy City” and the historic
city, as well as the co-substantial link that united the king to his city and, symbolically, the
god to the universe.


Caroline Février : Ponere lectos, deos exponere. Le lectisterne, une image du panthéon romain ?
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La cérémonie du lectisterne, qui consistait à convier les dieux à un banquet solennel dans le
but de les apaiser, est sans doute l’un des rites expiatoires les plus spectaculaires de la religion
romaine. Apparu au début du IVe siècle, à l’instigation des décemvirs sacris faciundis, responsables
à Rome des cultes étrangers, le lectisterne s’impose comme une pratique rituelle
innovante, dont le caractère grec ne semble guère contestable : inspiré des rites de convivialité
de la Grèce, le festin sacré réunit, au centre de l’Vrbs, des divinités anthropomorphes qui,
exceptionnellement, se « donnent à voir » aux hommes. Image ou mise en scène d’un sacrifice
grandiose, le lectisterne évoluera néanmoins au cours de sa brève existence pour devenir
un rite d’expiation global et, de ce fait, presque infaillible. En conviant les douze grands dieux
d’une religion hellénisée, Rome se conciliait, à travers eux, le panthéon tout entier.

Ponere lectos, deos exponere. The lectistern, an image of the Roman pantheon ?
The ceremony of the lectistern, which consisted of gathering the gods to a solemn banquet in
order to appease them, was undoubtedly one of the most spectacular of the expiatory rites of the
Roman religion. The lectistern imposed itself as an innovatory ritual practice around the beginning
of the IVth century, on the instigation of the decemvirs’ sacris faciundis, the priests responsible
in Rome for foreign cults. The convivial and festive Greek characteristics of the rites seem
unquestionable. In the centre of the Vrbs anthropomorphic versions of the divinities allowed
themselves – unusually – to be seen by men. These images and the staging of grandiose sacrifices
before them, the lectistern would nevertheless evolve over its brief existence to become a global
rite of expiation, and, as thereby, practically infallible. By inviting the twelve great gods of the
Hellenised religion, Rome was able to appease, through them, the whole pantheon of gods.


Jean-Claude Golvin : À propos de la restitution de l’image de Puteoli. Correspondances,ancrage,
convergences

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Parmi les exemples susceptibles de permettre d’énoncer clairement de nouvelles règles d’exploitation
des images anciennes, le cas de Pouzzoles était particulièrement intéressant. Il permettait l’exploitation d’une série de dessins sur verre très connus de façon beaucoup plus
poussée que jusqu’à présent, de la célèbre peinture de Stabies représentant un port, de dessins
anciens du port et de la grande jetée et de toutes les données archéologiques connues
publiées par P. Sommella et par la suite. La synthèse de toutes ces données a permis d’aboutir
à une image cohérente et évocatrice de ce grand port de l’Antiquité où figurent tous les
édifices connus encore visibles (amphithéâtre, marché, thermes et ceux dont la position et
l’image ont pu être restituées). Les notions de correspondance (occurrence du même élément
dans deux images), de convergence (présence d’un élément dans des documents de
nature très différente) et d’ancrage (présence dans une image d’un élément dont l’existence
est connue par des indices matériels) ont été définies.

About the image of Puteoli : correspondences, roots, convergences
The example of the port of Pouzzoles is particularly illuminating in highlighting how how to
make best use of ancient images – a use pushed well beyond what has been done hitherto in such
cases. This example draws upon a series of well-known engravings on glass, on the famous
painting of Stabies representing a port, of ancient drawings of the port and of the great pierhead
or jetty, together with all the known and published archaeological data by P. Sommella and others.
The synthesis of all this data has allowed us to arrive at a coherent and evocative image of
this great port of Antiquity where all the great public buildings known and still visible (the
amphitheatre, the market place, the public baths) and those whose position and likeness have
been able to be reconstituted. The notions of correspondence, convergence and pinpointing are
identified. Correspondence is taken to mean where the same element occurs in two images, convergence
where the presence of an element is indicated in documents which, of its nature is very
different, and fixing, the presence in an image of an element whose existence is known by material
indicators.


Jean-Pierre Guilhembet et Angeline Fallou : Sedvm regionvm locorvm nomina (Cicéron). La Rome antique à travers ses toponymes : les vici
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L’analyse de la toponymie urbaine est bien souvent négligée par les toponymistes : elle ne
manque pourtant pas d’intérêt pour l’histoire urbaine, est-il besoin de le rappeler. Dans le
cas de la Rome antique, le corpus disponible n’a que rarement fait l’objet de remarques
d’ensemble, alors que les études monographiques, souvent passionnantes, abondent. Les
noms de uici constituant une part prépondérante (près du quart) des toponymes (au sens
strict du terme) de l’Vrbs parvenus à notre connaissance, il est légitime de leur accorder une
attention particulière, d’autant plus que ne peut manquer de se poser à leur sujet la question
récurrente de leur classement comme odonymes et / ou microtoponymes. Après une présentation
succincte des orientations et des difficultés de l’approche toponymique, il s’agira,
dans les limites fixées par la documentation, de proposer quelques observations sur ce corpus,
à partir des problématiques classiques de la toponymie urbaine : typologie, origines,
strates, enjeux…

Sedum regionum locorum nomina (Cicéron). The vici : antique Rome through its place names
The analysis of the urban toponymy has so often been neglected by toponymists. Yet we need to
recall that it is not without interest for urban history. In the case of Antique Rome, the corpus of
work available hardly makes any general remarks about it, but monographic studies, often full of interest, abound. As it is the names of vici that make up the largest single part (nearly a quarter)
of toponyms (in the strictest sense of the word) that have come down to us, it is perfectly
legitimate to accord them particular attention, especially as we cannot escape the recurrent
question as to whether they might not be better classified as odonyms and / or microtoponyms.
After a brief review of the orientations and difficulties of the toponymic approach, as far as the
documentation allows, it is the purpose of this talk to put forward some observations on this corpus,
as they arise from the classic problematics of urban toponymy : typology, origins, strata…


Corinne Jouanno : Rome vue de la Grèce : l’exemple d’Épictète
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Épictète a vécu longtemps à Rome, où il fut esclave d’Épaphrodite, l’affranchi de Néron, puis
professeur de philosophie, avant d’être frappé par le décret d’expulsion de Domitien. Or la
ville de Rome occupe une place importante dans la géographie imaginaire des Entretiens, où
elle constitue, avec Athènes et Gyaros, un triangle symbolique : elle incarne le lieu du pouvoir,
des plaisirs, des affaires, et constitue un pôle attractif pour le profane, mais dangereux
pour le philosophe, à l’inverse d’Athènes, ville d’études, et de Gyaros, terre d’exil. Raisons
biographiques et philosophiques se conjuguent pour expliquer le caractère négatif de cette
image de Rome, fortement influencée par le souvenir des années noires du règne de Néron
et de Domitien, et par ailleurs victime d’une entreprise systématique de dépréciation du
pouvoir temporel.

The example of Epictetus : Rome seen from Greece
Epictetus lived for a long time in Rome, where he was a slave of Epaphroditus, freed under Nero,
became a teacher of philosophy, before suffering exile under Domitian. However the city of
Rome takes up a large part of the imaginary geography of the Conversations where the city
forms, along with Athens and Gyaros, a symbolic triangle : it embodies the seat of power, of
pleasure, of business, and is a honeypot for the profane – but this is dangerous for the philosopher,
in opposition to Athens, the city of learning, and of Gyaros, the land of exile. Biographical and
philosophical reasons come together to explain his negative depiction of the character of Rome,
heavily influenced by the dark years under the reign of Nero and Domitian, and, elsewhere, victim
of a systematic enterprise of the depreciation of the temporal power.


Marie-José Kardos : L’Vrbs dans les Satires de Juvénal
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Juvénal assure avoir trouvé l’inspiration de ses Satires dans les rues de Rome, et ses pages les
plus célèbres en décrivent avec beaucoup de verve les embarras et les dangers, de jour comme
de nuit. De sa vision pessimiste d’une réalité contemporaine à laquelle il oppose des temps
anciens idéalisés découle l’image négative qu’il offre de l’Vrbs dans son oeuvre, contrairement
à d’autres écrivains de sa génération. Le Cirque, où la foule se déchaîne, les forums, où l’argent
règne en maître, au mépris du droit et du mérite, les temples, négligés ou souillés par la débauche,
édifices publics et monuments sont les témoins de la corruption générale ; l’évocation
des statues des triomphateurs, le rappel du sauvetage du Palladium lors de l’incendie du
temple de Vesta font ressortir la décadence morale du temps par comparaison avec la vertu
des ancêtres, tandis que les références à l’Asylum du Capitole ou à l’Ara Maxima du forum Boarium illustrent la déchéance des Romains en général et de certaines grandes familles en
particulier. C’est aux quartiers d’habitation du nord-est de la Ville que Juvénal s’intéresse le
plus : Subure et son effervescence, les tranquilles Esquilies et le Viminal envahis par les Orientaux
 ; à propos de ces quartiers, aux détails pittoresques donnés sur l’Agger, domaine des saltimbanques
et des charlatans, s’ajoutent des allusions à l’époque où Hannibal menaçait la
Ville. Cependant la nostalgie du passé s’exprime surtout dans la description de la « Vallée
d’Égérie » près de la Porte Capène, dont la source n’a plus rien de naturel, comme dans le
nom d’Ouile donné aux Saepta, dont les commerces de luxe voisinent désormais avec le sanctuaire
d’Isis, et celui de « Champ de Tarquin », désignant le Campus qui, dans cette Rome
dégénérée, a perdu tout caractère « martial ».

The Vrbs in the Satires of Juvenal
Juvenal maintained that he found his inspiration for his Satires in the streets of Rome and his
best known pages provide a heady description of the confusion and dangers of city life, by day
and by night. His pessimistic vision of contemporary reality is set against idealised ancient times,
from which flows the negative image of the Vrbs in his work, in sharp contrast to other writers
of his generation. The Circus, where the crowd goes wild, the forums where money is master
while right and merit go to the wall, the neglected temples, or those desecrated by debauchery,
public buildings and monuments are all testimony to general corruption ; the evocation of statues
of triumphators, the memory of Palladium being saved during the fire at the temple of Vesta,
all this highlighted the moral decadence of the times, in contrast to the virtue of the ancients,
while the references to the Asylum of the Capitol or the Ara Maxima of the forum Boarium
illustrate the moral collapse of Romans in general and certain families of rank in particular.
Juvenal took the closest interest in the north-east quarters of the town : the bubbly Subure quarter,
the quiet Esquilies and the Viminal full of Orientals ; and while on the subject, the picturesque
details given on the Agger, the street acrobats and charlatans to which are added allusions
to the time when Hannibal threatened the city. Even so, the nostalgia for times past expresses
itself above all in the description of the “Valley of Egeria” near the Capenus Gate, the name
Ullage, given to the Saepta, where shops selling luxury goods juxtaposed the sanctuary of Isis,
and where the Campus of Tarquin, had now, in this degenerate city of Rome, lost all its original
military character.


Françoise Lecocq : Les premières maquettes de Rome. L’exemple des modèles réduits en liège de Carl et Georg May dans les collections européennes aux XVIIIe-XIXe siècles
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Inspirée de la technique traditionnelle des crèches de Noël napolitaines en liège, la « phelloplastique
 » est mise au service des voyageurs du Grand Tour, des collectionneurs d’antiquités
et de grands architectes, comme Louis-François Cassas ou Sir John Soane, pour fabriquer
des maquettes des ruines antiques d’Italie à l’époque de la redécouverte archéologique de
Paestum, de Pompéi et de Rome. Des artistes italiens comme Augusto Rosa, Giovanni Altieri,
Antonio Chichi, les exportent dans les diverses cours et capitales d’Europe, de Londres et
Stockholm à Saint-Pétersbourg, avant d’être concurrencés en Allemagne par Carl May, pâtissier
de la Cour de Ludwig Ier de Bavière à Aschaffenburg. Son oeuvre, mécénée par le souverain
et poursuivie par son fils Georg, constitue la plus importante collection au monde de
maquettes de monuments romains en liège, avec une cinquantaine de pièces, dont un Colisée
de 3 mètres de long. Outre leur statut d’objets d’art, elles constituent, de par leur rigueur scientifique, un précieux témoignage en trois dimensions sur la Rome contemporaine, complémentaire
des gravures de Piranèse ou des tableaux de Giovanni Panini et Hubert Robert.
La collection a été récemment restaurée et remise en valeur.

The first models of Rome. The example of cork models made by Carl and Georg May in the European collections in the XVIIIth and XIXth centuries
“Phelloplastic” was used by travellers on the Grand Tour, collectors of classical antiquities, and
famous architects like Louis-François Cassas or Sir John Soane, in order to make models of the
antique ruins of Italy at a time when the archaeological treasures of Paestum, Pompeii and Rome
were being rediscovered. Italian artists such as Augusto Rosa, Giovanni Altieri, Antonio Chichi
were all exporting them to the courts and capitals of Europe, to London, to Stockholm and to
Saint-Petersburg. But in Germany, Carl May, Pastry Cook to the Court of Ludwig 1st of Bavaria
– who patronised the work – created a competitive technique, using cork. Inspired by the traditional
technique used in Neapolitan Nativity models, Carl, along with his son Georg, who continued
the project, constructed over fifty cork models of Roman monuments, the largest such
collection in the world. The Colosseum alone had a diameter of over 3 metres. Quite apart from
their status as works of art, they make up a valuable testimony in three dimensions to contemporary
Rome, complementing the engravings of Piranese or the paintings of Giovanni Panini
and Hubert Robert. The collection has been recently restored and displayed in new facilities.


Anna-Maria Liberati : L’evoluzione urbanistica di Roma dall’età arcaica al tardo impero attraverso il diritto e le sue fonti. Alcuni esempi
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Après avoir illustré la représentation de Rome à l’époque impériale par l’examen de la grande
maquette de la Rome antique conservée au Musée de la Civilisation de Rome, lors du colloque
« Rome An 2000. Ville, maquette et modèle virtuel », A.M. Liberati cherche maintenant
à approfondir quelques aspects du développement urbanistique de la cité. Pour cela, elle
s’est servie, comme clé de lecture, d’un type particulier de sources : les textes juridiques. Partant
du présupposé que la genèse de certains espaces urbains et l’organisation juridique de
Rome se sont mutuellement influencées, elle a reparcouru la topographie de la cité, de l’époque
romuléenne à l’empire tardif, en donnant des exemples à l’appui de cette thèse. Parmi
les types d’édifices publics qui peuvent le mieux exprimer cette idée ont été choisis les lieux
consacrés à l’administration de la justice ; ceux-ci seront ensuite examinés en tenant compte
de l’évolution du procès criminel et privé. Quand on passe de la vie publique à la vie privée,
le droit de propriété sera illustré relativement à quelques aspects de sa connotation urbaine.
On verra comment l’évolution de la cité a conduit à la création d’autres droits réels : les
seruitutes, la superficies et l’habitatio. Le respect des règles qui y sont rassemblées aurait dû
permettre aux habitants de l’Vrbs de mieux profiter de l’espace urbain lui-même, en réalité
non dépourvu de problèmes, comme le font apparaître les nombreux cas d’actions en justice
qui sont exposés. Rome était une cité compliquée et chaotique, et assez souvent de nombreux
dangers pour la sécurité des citoyens étaient inhérents aux bâtiments eux-mêmes.
Cette considération introduit l’examen de quelques droits d’obligation. Justinien, dans ses
Institutiones, prévoit quelques sources d’obligations, définies comme des « quasi-délits » et
qui sont étroitement liées au développement urbanistique de Rome.

L’evoluzione urbanistica di Roma dall’età arcaica al tardo impero attraverso il diritto e le sue fonti. Alcuni esempi
In the symposium “Rome 2000 AD, city, a real and a virtual model”, the author illustrated the
representation of Rome in the Imperial age through an examination of the great model of
Antique Rome preserved in the Museum of Civilisation in that city. The author now sets out to
deepen our understanding of some aspects of the urban development of the city. To achieve this,
as a key to the lecture, she relies upon a particular type of source : legal texts. Starting on the supposition
that the development of certain urban spaces and the legal framework of Rome mutually
affected each other, she has gone over the topography of the city, from the Romulean period
up to the Late Empire, citing examples to support her thesis. Among the public buildings that
can best express this idea, have been selected buildings to do with the administration of justice.
These are then examined in the light of the evolution of the criminal and private legal process.
Turning from public to private life, property rights will be illustrated in relation to some aspects
of its urban connotation. We will see how the evolution of the city led to the creation of other real
legal rights : the seruitutes, the superficies and the habitatio. Abiding by the rules that were
drawn up should have allowed the inhabitants of the Vrbs to gain the maximum advantage
from the urban space itself, which in reality was not without its problems as a number of legal
cases the author outlines will show. Rome was a complicated and chaotic city, and quite often the
buildings themselves presented a number of real and inherent risks to the citizens. The examination
of some rights of obligation were brought into being : Justinian, in his Institutiones, foresaw
some sources of obligation, defined as “quasi-criminal acts” and which were closely linked
to the urban development of Rome.


Sophie Madeleine : La troisième dimension des insulae d’après les symboles de la Forma Vrbis Romae
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Cette communication propose de donner un des exemples méthodologiques d’évaluation
de la troisième dimension des édifices, souvent détruite et pourtant indispensable à leur
reconstitution virtuelle, en utilisant la Forma Vrbis Romae. Cette méthode sera appliquée à
un type architectural très précis, les insulae, dans le but de proposer des images virtuelles en
trois dimensions d’immeubles romains et, plus largement, de rues qui en sont bordées. Nous
verrons comment repérer les insulae sur la Forma Vrbis, comment les étages y sont représentés,
afin de proposer une estimation de leur élévation, pouvant atteindre une vingtaine de
mètres. Ces résultats seront ensuite confrontés aux textes législatifs, afin de voir si la hauteur
des insulae représentées sur la Forma Vrbis Romae correspond aux « normes » définies. La
communication s’achèvera par une proposition de reconstitution virtuelle d’une rue romaine,
élaborée dans le cadre de l’équipe « Plan de Rome » de l’université de Caen.

The third dimension of the insulae, as illustrated by the symbols of the Forma Vrbis Romae
This paper sets out a methodological example using the Forma Vrbis Romae to evaluate the
three dimensions of buildings which have often been destroyed, however it is vital to a virtual
reconstruction of the same. This method will be applied to a particular feature of architecture :
the insulae. The insulae will serve to illustrate virtual images in 3D of Roman apartment buildings
and more generally the roads that are lined by them. We will see how to spot the insulae on
the Forma Vrbis, and, by using the Forma Vrbis Romae how the different storeys of the buildings
may be represented, in order to work out how high they once were – which could reach over twenty metres. These results will then be set against legislative texts in order to see if the height
of the insulae represented in the Forma Vrbis Romae corresponds to the defined “norms”. The
paper will conclude with a proposed virtual reconstruction of a Roman street, created by the
Rome Mapping team of Caen University.


Nicole Méthy : Rome vue par un Italien du second siècle : le témoignage des lettres de Pline le Jeune
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Dans les lettres de Pline le Jeune, envisagées comme des témoignages sur la pensée de leur
auteur, la ville de Rome n’est, dans sa matérialité, qu’à peine entrevue. Car son nom devient
un double symbole, celui de valeurs et celui de la vie urbaine. Les valeurs romaines sont
avant tout morales et tenues pour essentiellement occidentales. La vie urbaine se définit par
la présence de la société et des contraintes qu’elle impose. Pline, en cela, suit la tradition. Il
s’en démarque, cependant, par la perspective adoptée et le jugement porté. Rome se distingue
de toute autre cité, par sa culture et non plus par son rôle politique. En dépit de cette
supériorité, elle ne doit pas constituer une destination unique ou un but ultime. La vie la
meilleure intègre, à parts égales, Rome et la campagne provinciale. Cet idéal, dans lequel la
petite patrie a au moins autant d’importance que la grande, doit son originalité au dépassement
de la hiérarchie traditionnelle. En Italien, Pline a un point de vue qui n’est ni étroitement
romain ni purement provincial. En homme du second siècle, il incarne la transition
entre un monde ancien, convaincu de la suprématie romaine, et un monde nouveau, qui
fonde cette suprématie sur d’autres bases et n’y voit plus un absolu.

Rome seen by an Italian of the Second Century : the testimony of the letters of Pliny the Younger
In the letters of Pliny the Younger, which were written with a view to revealing the thinking of
their author, the material city of Rome barely gets a mention. For its name became a double
symbol, those of its values and those of its urban life. The Roman values are above all moral and
are essentially western. Urban life is defined by the presence of society and the constraints it
imposes. Pliny was following the tradition in all this. He stands out however by the perspective
he adopted and the judgement he brought to bear. Rome was different from all other cities by its
culture and no longer by its political role. In despite of this superiority it must not make up a
unique end in itself or a final destination. The best life integrated in equal measure Rome and
the provincial countryside. This ideal, where local loyalties had at least as much importance as
larger loyalties, owes its originality to the sense of the traditional hierarchy of being overwhelmed.
In Italian, Pliny has a point of view which is neither narrowly Roman nor purely provincial. As
a man of the second century, he embodies the transition between the ancient world, convinced
of Roman superiority, and the new world, which bases this supremacy on other bases and where
one no longer sees an absolute.


Michel Jean-Louis Perrin : Hraban Maur et Rome : l’exemple d’un grand ecclésiastique à l’époque carolingienne
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Hraban Maur (780-856) a fait une très grande carrière ecclésiastique, qui commença sous
Charlemagne et connut son apogée sous Louis le Pieux et Louis le Germanique. Si on cherche
à savoir ce qui apparaît de Rome chez Hraban, il faut se rappeler qu’il n’est jamais allé physiquement
parlant à Rome, à la différence d’Alcuin, son maître. Si nous faisons rapidement
le bilan d’un ensemble monumental, Rome y apparaît comme un lieu bien entendu, mais aussi comme une ville, et même la Ville par excellence, dotée d’édifices remarquables, une
ville à l’histoire militaire, politique, religieuse hors pair. Hraban s’attarde particulièrement à
parler de Rome, puissance dominante du monde, dans ses rapports difficiles avec les Juifs,
Rome, la ville où saint Paul a été martyrisé, la ville de l’Église, des martyrs et de leurs reliques,
des papes – et donc le centre du pouvoir ecclésiastique –, mais aussi celle d’hérésies.
Tout cela manifeste avec évidence la place éminente de Rome la Ville devenue chrétienne, ce
que signifie encore « en creux » la censure persistante de l’expression communis patria. Une
comparaison rapide avec Alcuin dessine les mêmes lignes de force, mais avec une différence
importante : Alcuin est allé à Rome et en Italie. Il n’y a pas chez Hraban l’équivalent du carm.
25, 1 (PL 101, 778D-779A). Mais chez l’un et l’autre, Rome est essentiellement la ville des apôtres
et des martyrs, de saint Paul, des papes, avec tout ce que cela implique, en un mot la
capitale du monde.

The example of a great man of the church in the Carolingian period
Hraban Muar (780-856) enjoyed a great career in the Church, which started under Charlemagne
and reached its height under Louis the Pious and Louis the German. If one sets out to know how
Rome appeared at his time, we should recall that he, unlike Alcuin his teacher, never physically
went to Rome. If we make a rapid summary of the monumental ensemble, Rome appeared as a
well spread out site, but also as a city, even a City par excellence, endowed with remarkable public
buildings, and an unrivalled military, political and religious history. Hraban spoke of Rome
at some length, the dominant world power, with its difficult relations with the Jews, Rome, the
town where Saint Paul had been martyred, the city of the Church, of martyrs and their relics,
the city of Popes, and therefore the seat of ecclesiastical power – but also of heresies. All that was
plainly highlighted in this city that played an eminent role as the city that became Christian,
that is still set against a background of the persistent censorship of the expression of the communis
patria. A quick comparison with Alcuin sketches out the same lines, but also an important
difference : Alcuin went to Rome and to Italy. There is no equivalent to be found in Hraban of
carm. 25, 1 (PL 101, 778D-779A). But for both, Rome is essentially the city of the apostles and the
martyrs, of Saint Paul, the Popes, with all that implied, and, in a word, the capital of the world.


Anne-Valérie Pont : Valeurs culturelles et politiques du beau paysage urbain à Smyrne et à Nicomédie, du IIe au IVe siècle
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L’« ornement de la cité » est devenu un enjeu essentiel de la vie civique en Asie et dans le
Pont-Bithynie à l’époque romaine. La prolifération des constructions, que l’on observe alors
dans des cités de toutes tailles, ne doit pas être vue comme un signe de romanisation ou de
la maiestas imperii, comme on le trouve dans les lettres de Pline le Jeune à Trajan. Elle ne
l’était pas en tout cas aux yeux des habitants des cités grecques d’Asie Mineure occidentale,
qui considéraient la beauté de leur cité comme un achèvement de l’hellénisme d’époque
impériale. Selon Aelius Aristide, Smyrne est un « modèle de cité ». Nulle n’est plus belle ni ne
répond mieux à l’esthétique des espaces urbains alors définie dans cette région de l’empire.
Les inscriptions honorifiques pour ses évergètes constructeurs, l’impulsion décisive donnée
par les sophistes, au premier rang desquels figure Antonius Polémon, et enfin le titre très
particulier qu’elle reçoit de la part de Caracalla, celui d’« ornement de l’Ionie », confirment
la richesse de cette esthétique, qui renvoie à des valeurs morales et politiques vivantes. Nicomédie forme un contrepoint à cette vision : à partir du début du IIIe siècle, l’intérêt que
lui portent les empereurs brouille son identité de cité grecque, si bien qu’Ammien Marcellin
finit par qualifier cette capitale de « région de Rome ». L’Empereur y figure comme seul constructeur,
comme à Rome, et pour des bâtiments inhabituels dans ces provinces, un palais,
un cirque. Comme le montrent les deux exemples si différents de Smyrne et de Nicomédie,
l’esthétique urbaine traduit, en Asie Mineure occidentale, une conception culturelle et politique
spécifique de la beauté de la cité.

The cultural and political values of the beautiful urban landscape of Smyrne and Nicomedia in the 2nd and 4th centuries
The “ornament of the city” has become an essential challenge within Asian and Pont-Bithyian
civic life in the Roman period. The proliferation of constructions which we observe across cities
of all sizes, must notbe seen as a sign of Romanisation of or maiestas imperii, as we find in the
letters of Pliny the Younger to Trajan. There were not, at any rate, so seen in the eyes of the
inhabitants of the Greek cities of western Asia Minor, who considered the beauty of their city as
an achievement of Hellenism in the Imperial Age. According to Aelius Aristide, Smyrna is
“Model City”. No other city is more beautiful nor responds better to the aesthetic of urban spaces
as defined at that time and in that region of the Empire. The honorific inscriptions for the constructors,
the decisive impulsion given by the Sophists, the chief of whom was Antonius Polemon,
and finally that special title, “the ornament of Ionia”, that it received from Caracalla, all these
factors confirmed the richness of this aesthetic, which went back to living moral and political
values. Nicomedia formed a counterpoint to this vision : from the beginning of the IIIrd century
the interest shown by the Emperors confused its identity as a Greek city, to a point that Ammien
Marcellin ended up by describing this capital as a “region of Rome”. As in Rome, the Emperor
was the sole builder, and a palace and a circus – unusual buildings for provincial towns –
appeared. Smyrna and Nicomedia, two very contrasting examples demonstrate, in western Asia
Minor, how the urban aesthetic was able to translate a specific cultural and political idea of the
beauty of the city.


Bruno Poulle : Rome vue par l’humaniste Jean-Jacques Boissard (1528-1602)
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Humaniste protestant, J.-J. Boissard a écrit une ample Topographia et Antiquitates Vrbis
Romae, près de quarante ans après avoir séjourné à Rome. Sa description de la ville traduit
à la fois son amour de l’Antiquité et sa volonté de sauvegarder par la mémoire des ruines
menacées. Somme érudite axée sur la statuaire et sobre dans son admiration, cette topographie
doit beaucoup à des sources livresques contemporaines. Boissard présente une Rome
presque exclusivement antique et morte, dont la froideur est tempérée par sa conception et
sa pratique de l’amitié.

Rome as seen by the humanist Jean-Jacques Boissard (1528-1602)
Some forty years after staying there, the Protestant humanist J.-J. Boissard wrote a large volume
entitled Topographia et Antiquitates Vrbis Romae which described both his love of Antiquity
and his desire to save for posterity the ruins under threat. This topographic study owes much to
contemporary writings ; it is an erudite outline focussed on the statuary and, while sober and full
of admiration, Boissard presents a dead, Antique city. His cold analysis is tempered by his idea
and practice of friendship.


Manuel Royo et Brice Gruet : Décrire Rome : fragment et totalité, la ville ancienne au risque du paysage
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Ce travail emprunte pour partie son titre à celui de l’ouvrage de C. Edwards : Writing Rome.
Cependant, à la différence de l’auteur britannique, notre perspective, sinon notre approche,
se fera à travers la question du paysage, notion controversée s’agissant de l’Antiquité, et sur
le regard que l’on porte par le biais des mots qui le qualifient. Parler de l’apparence de la
ville, comme l’ont fait certains auteurs latins, implique une mise à distance – au moins intellectuelle
–, préalable indispensable à toute conception paysagère de l’espace vécu. Ce recul
suppose à son tour une pratique particulière du regard, comportant des « codes » propres à
cette culture et organisant la « mise en cadre » de son objet ; celle-ci décide aussi du choix
privilégié de certains supports et oriente l’usage de ces images et le rôle que l’on entend tenir
dans le tableau ou face à celui-ci.

Writing Rome : fragment and totality ; the ancient city threatened by landscape
This work at least in part owes its title to the work of C. Edwards, Writing Rome. However we
differ from the British author as, from our perspective and in our approach, is made through the
question of the landscape, a controversial notion when it comes to Antiquity. It is also made
through the observation of landscape as identified through the bias of the words that qualify it.
To speak of the appearance of the city, as certain Latin authors did, implies a distancing, at least
an intellectual distancing, as an indispensable preamble to any idea of the landscape as a livedin
space. This detached attitude supposes in turn a particular way of looking, consisting of codes
unique to this culture and organising the setting up of a “framework” for its object. This also
decides the privileged choice of certain supports and orientates the images and the role that one
expects to maintain in the picture, or when standing before the same.


Pierre Sineux : Pour une relecture des récits de guérison de l’Asklépieion de l’île Tibérine
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Dans la deuxième moitié du IIe ou au début du IIIe siècle après J.-C., on inscrit en grec, sur
une stèle de marbre, de courts textes qui racontent comment des malades venus au sanctuaire
d’Asklépios-Esculape ont trouvé, à la suite d’un rêve, la guérison. Relire ces textes aujourd’hui
revient à montrer comment ils participent à la tradition des « récits de guérison » des
sanctuaires asklépieiens du monde grec et à examiner la confrontation de cette tradition
grecque aux réalités cultuelles et culturelles de la Rome impériale, ce qui implique notamment
de s’interroger sur la question de leur réception et sur leurs fonctions.

Re-reading the accounts of healing in the Asklepieion on the Tiberine Island
In the second half of the IInd and beginning of the IIIrd centuries AD, short Greek texts cut on a
marble stela describe how the sick came to the sanctuary of Askleplios-Esculape and, after a
dream, were made well. A re-reading of these texts today shows how they were part of the tradition
of “accounts of healing” of asklepian sanctuaries of the Greek world. We examine the confrontation
of this Greek tradition with the realities of Imperial Roman cults and cultures, which
implies in particular an examination of their reception and their functions.


Jean-Paul Thuillier : Une journée particulière dans la Rome antique. Pour une topographie spor
tive de l’
Vrbs
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La lettre de Pline le Jeune 9,6 fait apparaître que Rome se vide de ses habitants au moment
des jeux du cirque, et vit alors une sorte de « journée particulière ». On voudrait étudier ici
la topographie sportive de l’Vrbs, comme on a pu parler d’une topographie des exécutions
ou des opérations financières, et on ne se limitera pas à la seule situation, d’ailleurs bien connue
en général, des édifices de spectacle. Le fait que la Rome antique a été une mégapole et
que le Grand Cirque par exemple était situé en pleine ville ont eu des conséquences importantes,
mais les mouvements de la foule des supporters n’avaient pas pour seul but la zone
de la vallée Murcia, entre Palatin et Aventin. Des nécropoles, les sièges des différentes factions,
des rues et des places pouvaient être investis par les supporters des couleurs et les fanatiques
des ludi circenses : le témoignage d’Ammien Marcellin ne manque pas d’intérêt à ce sujet.

A special day in the antique Rome : the sportive topography of the Vrbs
The Letter 9.6 of Pliny the Younger shows how Rome emptied of its inhabitants when the games
were played in the Circus, and lived out a sort of “special day”. We set out here to study the sportive
topography of the Vrbs, just as one has been able to talk about the topography of executions
and of financial dealings, and we do not limit ourselves here to the one situation, well-known in
general, of the buildings for public entertainments. The fact that Antique Rome was a megopolis
and that the Great Circus for example was situated in the heart of the city had considerable consequences,
but the flow of the crowds of supporters did not merely head for the area of the Murcia
valley, between the Palatin and the Aventin. The necropolises, the seats of different factions, the
streets and squares could be filled by the supporters of different colours, and the fanatics of the
ludi circenses : the testimony of Ammien Marcellus is not without interest on this subject.


Hubert Zehnacker : La description de Rome dans le livre V du De lingua latina de Varron
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Au livre V du De lingua latina, Varron examine les mots de la langue latine exprimant en
prose les différents aspects de la notion d’espace. Cette recherche, dont le caractère étymologique
est fortement marqué, aboutit à une enquête sur les toponymes de la ville de Rome,
qui prend en compte d’abord les noms des lieux, puis ceux des monuments. La méthode de
Varron tient compte de l’enseignement d’Aristophane de Byzance autant que de celui de
Cléanthe ; le savant romain veut combiner la théorie de l’analogie et celle de l’anomalie ; les
mots prennent leur origine à la fois dans la physis et dans la thésis. Varron privilégie donc les
étymologies les plus anciennes, remontant de l’époque des rois de Rome et de celle de Romulus
au moment de la venue d’Hercule et d’Évandre, et même, parfois, aux temps immémoriaux
de Saturne. Lorsqu’il cite les poètes latins dans la droite ligne d’Aristophane de Byzance,
Varron se réfère de préférence aux plus anciens d’entre eux ; il a recours aussi au document
vénérable que sont les Livres Pontificaux. Au total, Varron offre l’explication étymologique
d’un nombre important de noms propres relatifs à la ville de Rome ; certains sont des hapax,
d’autres concernent des réalités en voie de disparition de son temps. Une rapide comparaison
du texte de Varron avec le livre II du De republica de Cicéron, le livre V de Strabon et le
livre III de Pline l’Ancien montre la profonde originalité de la démarche adoptée dans le De
lingua latina : à travers les données linguistiques, Varron cherche à atteindre l’essence même
du site et de la ville de Rome.

The description of Rome in Varro’s Book V of the De lingua latina
In Book V of the De lingua latina Varro examines the Latin words that express in prose the different
aspects of the notion of space. This research, in which the etymological character is particularly
marked, leads to an investigation of the toponyms of the town of Rome. This investigation
takes into account first the place names, then those of the public monuments. Varro’s method
look as much to the teaching of Aristophanes of Byzantium as much as to that of Cleanthus ; the
Roman savant sets out to combine the theory of analogy and anomaly. Words find their place
both in the physis and in the thesis. Varro emphasises the etymologies of the most ancient etymologies,
going back to the time of the Kings of Rome and to that of Romulus at the time of the
coming of Hercules and Evandre, and even sometimes, back to the Time Immemorial of Saturn.
When he quotes from the Latin poets going back in direct line to Aristophanes of Byzantium,
Varro prefers to refer to the most ancient among them ; he also falls back on venerable documents
which are the Pontifical Books. Altogether, Varro offers the etymological explanation of a large
number of proper names relating to the City of Rome ; some of them are hapax (only one example
of the word’s use exists) ; others concern realities that were disappearing in his own time. A
rapid comparison of Varro’s text with that of Book II of Cicero’s Republic, Strabo’s Book V and
Pliny the Elder’s Book III, shows the profound originality of what the De lingua latina sets out
to achieve : through linguistic data Varro looks to reach into the essence itself of the site and of the
city of Rome.

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